La télé qui rend les gens géniaux
Il a 15 ans. C’est encore un enfant. Et les vidéos de lui qui circulent sur la toile provoquent hilarité, consternation, voire énervement chez beaucoup d’internautes.
Cet enfant, c’est Gilbert.
Le premier reportage nous l’avait présenté comme un souffre-douleur. Mal-aimé, chahuté voire carrément tabassé, ses années au collège semblaient vraiment difficiles pour lui. Il était différent. Il venait en costard au collège. Il se faisait brutaliser. On se prenait de pitié pour lui, même si l’on ne pouvait pas s’empêcher de se dire que mettre un costard dans un collège de banlieue n’était pas très fin. Et puis, au fur et à mesure que le reportage avance, on nous le présente comme un surdoué de l’informatique. Un enfant-prodige. Un petit génie. Sauf que.
Sauf que Gilbert n’est rien de tout ça. Pas en informatique, tout du moins. Et ça se voit vite, nul besoin d’avoir fait dix ans d’informatique pour le conclure. Il ne suffit pas de fanfaronner avec ses Certifications Microsoft et son Certificat d’Excellence signé par Bill Gates, tout fier de l’avoir obtenu «en quatre minutes» alors qu’un «ingénieur qui a au moins 5 ans d’expérience en entreprise (…) prend 4 ou 5 heures pour le faire». Un rapide coup d’oeil à ses performances en matière de programmation (ça se trouve en quelques minutes sur Google, il suffit de bien chercher) permet de finir d’être convaincu de son absence de génie. Et les diplômes, alors ? Rien de bien sorcier, on apprend les réponses par coeur, et on les a. N’importe quel tocard qui y met le prix les aura. Le reportage est un ramassis de fadaises sur ses supposées compétences, la «journaliste» avale sans rechigner toutes les âneries qu’on lui propose et les retranscrit brut de décoffrage. On se dit qu’il est jeune, ça va lui passer.
Le second et le troisième reportage permettent de mieux cerner l’origine de tout ceci: sa mère. Atrocement possessive, incroyablement saoulante, c’est elle qui lui a dès le début bourré le mou avec sa soi-disant précocité. C’est elle qui est, depuis le début, persuadée que son fils est un génie, et qui a réussi à lui aussi l’y faire croire. Ah, elle en est fière, de son fils. C’est elle qui achète un mobil-home pour que son fils pense à autre chose qu’à son travail. Car oui, Gilbert est devenu PDG d’une entreprise de création de sites web. On peut le voir, toujours fanfaronnant, dans son bureau, en rendez-vous d’affaires (jugeant de la qualité d’un vin qu’on vient de lui servir en carafe, il ne faut pas manger en regardant ça sinon on s’étouffe de rire), etc. Convaincu qu’il est génial et super fort. Et toujours aussi arrogant. Prétentieux. Désagréable. Agressif avec le journaliste qui lui dit “avoir du mal à ne pas le tutoyer” lors du débat du troisième reportage.
Soyons clairs: Gilbert est relativement mature, certes. Il a clairement des motivations et un raisonnement qui tranchent avec son âge. Mais il n’est pas, et n’a jamais été le génie que sa mère a voulu faire connaître à la face du monde via la télévision. Cette mère lui a volé sa vie. La réplique de la fin de la troisième vidéo est cinglante. Et véridique: Gilbert, get a life.
Au delà du personnage, ce qui m’inquiète c’est cet éternel sensationalisme des média. Était-il si difficile lors de la réalisation des deux premiers reportages de se renseigner un minimum afin de vérifier si Gilbert était réellement le génie que sa mère prétendait ? Je ne connais, parmi les gens que je cotoie qui travaillent dans l’informatique, personne qui ait cru une seconde au génie de Gilbert dans ce domaine. Mais l’objectif affiché de la journaliste était de faire du choc. Du grand. Au risque de balancer un reportage tellement peu crédible qu’il fait actuellement le tour d’Internet, et rend Gilbert complètement ridicule aux yeux de ceux qu’il voudrait comme pairs. Le second reportage était diffusé dans une émission qui présentait des enfants atteints de maladies diverses. J’ai trouvé indécent d’oser consacrer un quart d’heure à Gilbert après avoir montré des enfants qui, pour certains, sont peut-être décédés depuis la diffusion de cette émission. Pourquoi personne n’a-t’il jamais eu l’idée de vérifier si Gilbert n’était pas un nul ? Pourquoi à la télévision est-il devenu saugrenu de se demander si ce que l’on est en train de montrer n’est pas une connerie ? Pourquoi la réflexion doit-elle aussi souvent se faire par le téléspectateur, et jamais en amont ? J’ose espèrer que les incapables qui produisent ces reportages ne se disent pas journalistes.
Commentaire de Leskimo
11/7/2008 @ 13:31
moi je savais faire du css à deux ans !!
Gilbert c’est un nase ! Bill gates il m’a embauché pour son site perso pour le html ! haha