Lundi (4)
Alors que l’avion amorçait sa descente vers Paris, Fei Wong se remémora les semaines précédentes ainsi que les événements qui avaient causé ce voyage. Depuis plusieurs mois les relations économiques entre la Chine et le reste de l’Europe n’étaient plus des meilleures. La France, plus particulièrement, s’était montrée agressive au possible en fermant ses frontières aux produits chinois. Les Allemands, plus pragmatiques, en étaient restés à un système de quotas, même si ceux-ci allaient vers de plus en plus de rigidité. Les autre pays avaient tous pris des mesures plus ou moins drastiques pour limiter les importations. Pour Pékin, l’humiliation était de taille: qui étaient ces responsables politiques qui prônaient le libéralisme à outrance lorsque le vent étaient favorable, mais devenaient subitement protectionnistes dès lors que leur économie était menacée ? Les règles du jeu étaient faussées. Ce comportement était inacceptable.
Sur le fauteil à droite de Fei, son collègue Pai Mei était relativement nerveux. Le suicide de sa femme deux mois plus tôt suite à la faillite de son entreprise avait mis ce dernier particulièrement à cran. Il but une rasade de whisky. Fei espèra brièvement que la fébrilité de Pai n’allait pas tout faire foirer.
Son supérieur avait été clair: ils n’avaient pas le droit à l’échec, il y avait trop d’argent en jeu. On leur avait promis en cas de succès un avancement considérable. La Chine se devait de récupèrer les marchés européens.
Fei se dit, déçu, qu’il ne pourrait pas visiter Paris. Même si la capitale avait perdu de sa superbe, elle ne devait pas être désagréable à cette époque de l’année. Huit heures pile. Le vol Air China numéro 8859 était maintenant tout proche de l’aéroport de Roissy-Charles de Gaulle. Quelques minutes de retard, mais rien de bien gênant. Le temps était superbe, la journée promettait d’être belle. Le vol n’avait pas été particulièrement désagréable malgré sa relative longueur. Un brin fatigué, Fei commença à bailler mais s’interrompit aussitôt, comme s’il eut craint qu’un de ses supérieurs l’ait vu faire. Il attacha sa ceinture tout en admirant la vue. Pai l’imita rapidement.
Fei éprouvait pour les concepteurs de l’opération un immense respect. Il s’était immédiatement porté volontaire, même s’il savait depuis le début qu’il n’aurait jamais droit à l’avancement promis. Quelques semaines de bricolage avaient suffi pour faire d’un bombardier une réplique quasi conforme d’un avion civil tout ce qu’il y a de plus classique.
L’Europe était devenue un problème préoccupant pour nombre d’entreprises de Pékin ou de Shanghai. Un problème si préoccupant que le gouvernement avait décidé de le traiter à bras-le-corps. La France servirait d’exemple. Les autre pays européens et les américains tenteraient probablement une riposte, mais seraient rapidement écrasés par la puissance de l’armée chinoise. L’histoire avait oublié d’apprendre l’humilité aux États-Unis, la Chine allait s’en charger. Les vaincus achèteraient des produits chinois pour procéder à leur reconstruction. Quant aux autres, ils sauraient à quoi s’en tenir.
Depuis plus de dix minutes, la tour de contrôle de Roissy s’égosillait en leur ordonnant de faire demi-tour, leur serinant que le survol de Paris était interdit. Ils n’avaient pas assez de carburant pour refaire le chemin du retour jusqu’à Pékin, et Fei le savait. Mais Fei savait également qu’ils avaient largement le temps d’atteindre l’objectif. Pai et lui avaient près de quinze ans de pilotage derrière eux, ils étaient convaincus de pouvoir atteindre l’océan Atlantique et de s’y crasher avant de se faire descendre par un avion de chasse de l’armée française.
Huit heures et cinq minutes. Fei échangea un regard avec Pai. Ils déposèrent tous deux une main sur les clefs des boîtiers contrôlant le largage de la charge nucléaire.
Fei commença à compter.
Trois.
Deux.
Un.
Ils tournèrent les clefs.
Ce que Fei ne savait pas, c’est qu’à cette altitude l’explosion d’une charge de cinquante mégatonnes serait tellement colossale que ni lui ni Pai n’avaient une chance d’en réchapper.
Et leur mission fut terminée.
(à suivre)
Commentaire de rom1
17/8/2005 @ 22:24
je le savait saloperie de chinois du FBI